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Un article qui nous aide à comprendre ce qu’on ressent avant un départ.
Ou à comprendre ce que viennent de vivre les gens qu’on accueille.
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Six? Est-ce qu’on a ENCORE ajouté une phase dans le processus de l’adaptation culturelle?
Parce que… quand j’ai fait mon premier stage Québec sans frontières (QSF), on parlait d’une courbe d’adaptation de 4 phases :
La lune de miel
Le choc culturel
L’ajustement
L’adaptation
Et quand Suzie Yeo d’Autrement d’ici est venue nous parler lors de notre formation retour, elle a ajouté une 5e phase : celle du retour. Et par chance. Parce que mon retour, il a été chaotique. Et long. Mais ça, c’est un autre sujet.
Aujourd’hui, je viens ajouter une 6e phase. Oui, oui. Celle du stress prédépart.
Le stress créé par l’anticipation
Une amie dont le plus jeune est entré à la maternelle cette année m’a montré la lettre que l’enseignante a fait parvenir à son futur élève avant la première journée de classe. Cette lettre lui explique que la veille de la rentrée, il se pourrait qu’il ait de la difficulté à s’endormir. Qu’il pourrait avoir plein de questions en tête.
Est-ce que je vais aimer l’école?
Vais-je me faire des ami.e.s?
Est-ce que mon enseignant.e sera gentil.le?
Et que c’est normal.
Que ça se pourrait même qu’il ait des papillons dans le ventre. Que ça aussi, c’est normal. La preuve : elle en a elle aussi!
C’est parce qu’elle a hâte de le rencontrer et de commencer cette belle aventure avec lui. Ils vont s’accompagner là-dedans, pour rendre l’expérience la plus agréable possible.
C’est beau, non?
Le départ à l’étranger, c’est un peu la même chose. On a beau se faire une idée de ce à quoi cela va ressembler, on ne peut pas en être certain.e tant qu’on n’y est pas. On peut donc avoir plein de questions.
Comment vais-je m’adapter?
Est-ce que les gens avec qui je vais travailler vont m’apprécier?
Et j’en passe.
Toutes ces questions qui n’auront réponse qu’une fois sur place peuvent générer un stress, qu’il soit perceptible ou non.
Regardons cela plus en détail.
L’étape qui précède la courbe d’adaptation à l’étranger : la préparation au départ
On est le 26 mai, 20 h 30.
Votre vol pour [votre destination] est demain matin. Vos bagages sont prêts, vous avez dit au revoir à votre famille et à vos ami.e.s.
Mais…
Vous vous demandez si c’est vraiment une bonne idée de partir. Vous trouvez plein de raisons qui justifient de ne pas partir. Vous songez à tout annuler.
…
Si cela vous arrive, dites-vous que c’est… NORMAL!
On va souvent sous-estimer l’angoisse prédépart. Pourtant.
Rewind.
Janvier
Vous voyez une offre pour un mandat en/à [votre destination - que ce soit à l’international, dans une autre province ou même dans le Nord québécois]. Vous avez toutes les compétences requises. Vous désirez depuis longtemps avoir une expérience de travail dans un nouveau contexte culturel. Vous vous dites que ça y est, c’est votre chance. Vous préparez votre dossier de candidature. Vous l’envoyez. Vous vous croisez les doigts.
Février
Votre candidature est retenue pour les prochaines étapes. Vous passez à travers le processus d’embauche. Pour recevoir ce dernier courriel : « Félicitations, vous avez obtenu le poste! »
Mars
Vous annoncez la bonne nouvelle à tout le monde! Vous allez lire des témoignages de gens qui ont fait la même chose. Vous regardez des photos des lieux, des mets typiques… Vous vous créez un beau scénario.
Avril
Vous recevez plusieurs documents à lire. À signer. À faire remplir par telle personne, et telle personne. Des formations prédépart à faire. Des choses à acheter… Toutes ces étapes commencent étrangement à vous rappeler la recherche du formulaire A-38 dans Les douze travaux d’Astérix.
Vous trouvez que ça fait beaucoup de choses à penser. Vous vous demandez si ça vaut vraiment tout ce travail.
…
Est-ce que vous me voyez venir? Est-ce que ça ne vous fait pas penser à certaines phases de la courbe d’adaptation?
Parce que oui, on vit, quelques semaines, quelques jours ou même quelques heures avant notre départ, une partie de la courbe du processus d’adaptation.
Phase 0 : Le stress prédépart
L’excitation à l’idée de partir ressemble étrangement à la lune de miel.
Viennent ensuite les démarches administratives et logistiques. La liste des choses à faire avant de partir peut être longue et stressante. Ces choses peuvent devenir des irritants, qui peuvent ressembler à une grosse montagne difficile à escalader.
C’est normal : il s’agit du creux de vague prédépart.
Si vous avez pu commencer les démarches de préparation tôt.
Si vous avez eu le temps de vous organiser, de faire une liste des choses à faire et à emporter.
Si vous bénéficiez du soutien de votre entourage.
…
Les risques que ce creux soit profond sont grandement diminués, mais pas pour autant annulés.
Il s’agit de prendre un moment pour se souvenir pourquoi on part, de se changer les idées et de profiter de notre dernière soirée avec nos proches… en se rappelant que nous les reverrons très bientôt!
Pour ensuite se préparer à entrer, dès demain, dans notre vraie lune de miel!
Comprendre le stress prédépart pour mieux accueillir
Les gens que l’on accueille au Québec passent par le même processus prédépart. Mais ont-ils les mêmes conditions?
Ont-ils accès à une formation prédépart structurée?
Leur séjour est-il temporaire ou permanent?
Bénéficient-ils d’un soutien avant, pendant et après leur arrivée?
Ces questions nous rappellent que chaque expérience est unique. Et n’oublions pas que le processus peut varier considérablement selon la culture d’origine. (On pourrait approfondir ce sujet dans un autre article, qu’en pensez-vous?)
Le stress prédépart, déjà intense pour un séjour temporaire, pourrait-il atteindre des sommets lorsqu’il s’agit d’un départ sans retour prévu? On peut l’imaginer.
En tant que société d’accueil, on gagnerait à garder en tête ce parcours émotionnel complexe. Un accueil empreint d’ouverture, de compréhension et d’espace pour s’adapter peut faire toute la différence. Après tout, chacun.e d’entre nous a déjà vécu, à sa façon, le stress d’un nouveau départ, non?
La prochaine fois qu’on rencontrera un.e nouvel.le arrivant.e, on pourrait se rappeler que derrière son sourire se cache peut-être tout un monde d’émotions. Un peu d’empathie, ça peut aller loin!
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